au cœur de la pierre

Nous demeurons au cœur de la pierre… je l’ai toujours senti ainsi… depuis le commencement… 

Enfant, je me suis penchée sur cet interstice minuscule qui embrasse la pierre … petit interstice invisible pour les yeux pressés au regard afféré et qui passent sans voir … dans cet interstice j’ai vu un monde premier… sans barrières… sans table des matières, ni règle du jeu ou mode d’emploi… un monde où rien ne nous retient, ni ici, ni ailleurs… 

Le souffle de la pierre nous porte d’une ouverture du monde à une autre… vers le souffle de l’air… une douce lumière… dans cette entaille sèche et cependant fertile, indescriptible, demeure la grâce… 

Aujourd’hui, cette trace reste intacte tout au fond de mes paumes… souvenir gravé dans les lignes de mes mains… Je me souviens comme je traversais les portes des demeures… les murailles de rocailles, l’eau de la rivière et l’écorce des arbres… Je puisais dans le cœur de la pierre des secrets, des mystères dont certains venaient des profondeurs des âges… 

Je les ai gardées précieuses dans l’écrin de mes mains, ces pépites venues d’un monde minuscule … sans âge ni langage… petites pierres celées à la splendeur cachée des choses, que je redécouvre dès que je leur tends la main…