jeudi 5 avril 2018

passage





Le passage est ouvert et descend vers la mer, on entend la rumeur venue du fond du gouffre… Il a rêvé l’instant où les couleurs se posent sur la joue de la plage. Il espère et sourit aux oiseaux qui s’ébrouent dans des flaques de mer … un œil sur le côté et le pied sur la dune… Là-bas les nuages s’accrochent au ciel qui transpire 

Chaque soir, il revient quand le soleil s’éteint… il caresse l’air pourpre de sa main d’eau de rose… Il invente le temps et défait les étoiles pour les coudre en bordure des vagues qui respirent… Il est enfant des îles, il est petit et roi, il avance sur la berge et ne se retourne pas… 

Les plus grands sont partis vers des nuits de tourmentes, vers des nuits sans étoiles et sans vin de la vigne… Ils reviendront plus tard sur les chemins d’orage, l’âme vacante du désir de vivre… Ils referont le tour des grandes solitudes et des naufrages verts de leur adolescence, cette jeunesse perdue sur les bancs de la terre… 

Il revient, et il marche… exalté, magnifique, le visage couleur d’ambre et les yeux pierres précieuses sous leurs paupières roses… Il chante et se souvient ses grandes insouciances qui le conduisaient tranquille vers de belles errances, laissant derrière lui sa dépouille inutile… Il marche, il a chaud et boit l’eau fraîche du gouffre de la mer… eau d’écume et de brume et de poudre de lune… 

Lorsque la nuit tombe, il essuie sur ses lèvres la lumière du soir, étincelle de verre brillant de mille étoiles, et se revêt du voile qui s’étire sur le monde… Il remonte la grève les pieds nus dans le sable, il cueille une herbe-feu pour éclairer sa nuit… cette nuit sans étoiles qui enténèbre sa vie … 

Il s’accroche au vent qui cogne à ses tempes, il s’accroche et remonte le chemin vers la mer, ce passage de miel qui s’ouvre sur le monde, sur sa vie d’enfant sombre qui ne comprend pas le monde, sur sa vie d’enfant triste qui se tait et succombe aux grandes solitudes de son enfance profonde… 

Il est enfant miroir et reflète nos demeures insalubres et fragiles, à petits cris plaintifs qui miroitent sur l’onde… 









2 commentaires:

Patrick Lucas a dit…

les couleurs se posent
en bordure des vagues
sur les chemins d’orage
vers de belles errances
qui enténèbrent sa vie
d’enfant triste qui se tait...
nos demeures miroitent sur l’onde…

Ariaga a dit…

Je marche à reculons dans la beauté de tes derniers textes.