poème de Mahmoud Darwich
" Sur cette terre, il y a ce qui mérite vie : l’hésitation d’avril,
l’odeur du pain à l’aube, les opinions d’une femme sur les hommes, les
écrits d’Echyle, le commencement de l’amour, l’herbe sur une pierre, des
mères debout sur un filet de flûte et la peur qu’inspire le souvenir
aux conquérants.
Sur cette terre, il y a ce qui mérite vie : la fin de septembre, une
femme qui sort de la quarantaine, mûre de tous ses abricots, l’heure de
soleil en prison, des nuages qui imitent une volée de créatures, les
acclamations d’un peuple pour ceux qui montent, souriants, vers leur
mort et la peur qu’inspirent les chansons aux tyrans.
Sur cette terre, il y a ce qui mérite vie : sur cette terre, se tient
la maîtresse de la terre, mère des préludes et des épilogues. On
l’appelait Palestine. On l’appelle désormais Palestine. Ma Dame, je
mérite la vie, car tu es ma Dame. "
Mahmoud Darwich 1986
extrait de La terre nous est étroite