vendredi 6 septembre 2019

tourbillon







Dépouillement, solitude, silence.

Tout se retire et tout se perd dans la pénombre. Sous le masque et le brillant, le vivant n’est plus, seul subsiste le néant. 

Tout ce jaune et tout ce vert, tout ce noir et tout ce bleu, en tourbillon devant les yeux, et ce tumulte dans le crâne, dans le cœur de la flamme et les doigts crochus du vent. Tout ce poids qui brise l’âme en poussière de cailloux, en fétus d’herbe sèche, en lambeaux de peau… sous l’acier du couteau. 

Les paupières sont gonflées de tant de larmes, de tant d’attente, de tant de rien, de tant de fièvre et de cauchemars dans cette terre dévastée. Ce sol vide, anéanti, tari et fatigué par tant de pillages  égoïstes.

Il faut prendre courage, et du bout du bec reconstruire le nid douillet d’espérance et de gloire. Essuyer les larmes, et saisir d’entre les doigts du vent les petits cailloux de pluie et de soleil qui engendrent l’arc-en-ciel. 

Le monde alors s’éveille de sa longue nuit. Un enfant à naître épie déjà ses songes dans ce monde vierge et nu où l’air est translucide, limpide et parfumé des fleurs de l’ombre. Le jour se lève et peigne les cheveux, frotte les peaux, caresse les âmes tristes.

La blessure est sensible et baille dans l’aube du jour nouveau, jour né d'une blessure qui s'amenuise.








"C'est une blessure large et profonde qui s'est lentement cicatrisée, mais demeure encore sensible"(*).

 (*)V. Van Gogh (lettres à Théo)








9 commentaires:

Anonyme a dit…


Le silence

Le silence uni de l'hiver
est remplacé dans l'air
par un silence à ramage ;
chaque voix qui accourt
y ajoute un contour,
y parfait une image.

Et tout cela n'est que le fond
de ce qui serait l'action
de notre coeur qui surpasse
le multiple dessin
de ce silence plein
d'inexprimable audace.


Rainer Maria Rilke

Anonyme a dit…

Votre texte est vraiment très beau et audacieux, le parallèle avec les mots et "Le Champ de blé aux corbeaux" de Vincent Van Gogh, lui sied parfaitement. Oui, c'est vraiment très beau. Merci. Une belle entrée dans la nuit.

https://www.biographie-peintre-analyse.com/2012/12/27/vincent-van-gogh-champ-de-bl%C3%A9-aux-corbeaux-1890-analyse-d-oeuvre/

Bien à vous chère Maria.

mémoire du silence a dit…

Cher(e) Anonyme
merci pour Rilke
merci pour cette belle analyse
merci pour vos passages
merci pour vos regards
amitié anonyme

Anonyme a dit…

Je suis un sans "e". (sourire).
Peut-être cela me rendra moins anonyme.
Merci à vous Maria pour tout ce que vous donnez à voir, à lire et à attendre.

Anonyme a dit…

à entendre et nous à attendre (joli lapsus).

Anonyme a dit…

Si je vous dis : j'ai tout abandonné
C'est qu'elle n'est pas celle de mon corps,
Je ne m'en suis jamais vanté,
Ce n'est pas vrai
Et la brume de fond où je me meus
Ne sait jamais si j'ai passé.

L'éventail de sa bouche, le reflet de ses yeux,
Je suis le seul à en parler,
je suis le seul qui soit concerné
Par ce miroir si nul où l'air circule à travers moi
Et l'air a un visage aimant, ton visage,
A toi qui n'as pas de nom et que les autres ignorent,
La mer te dit : sur moi, le ciel te dit : sur moi,
Les astres te devinent, les nuages t'imaginent
Et le sang de la générosité
Te porte avec délices.
Je chante la grande joie de te chanter,
La grande joie de t'avoir ou de ne pas t'avoir,
La candeur de t'attendre, l'innocence de te connaitre,

O toi qui supprimes l'oubli, l'espoir et l'ignorance,
Qui supprimes l'absence et qui me mets au monde,
Je chante pour chanter, je t'aime pour chanter
Le mystère où l'amour me crée et se délivre.

Tu es pure, tu es encore plus pure que moi-même.


Paul Eluard

Gérard a dit…

de tant d’attente,....quelle coïncidence avec mon post de ce jour.

ioulia a dit…

Ça évoque beaucoup. C'est magnifique, aussi !

mémoire du silence a dit…

@ Anonyme ...

un peu moins anonyme mais toujours un peu tout de même, merci pour Eluard j'aime beaucoup




@ Gérard ...

oui, ici"Je mettrai mon cœur dans du papier d'argent"




@ ioulia ...

merci pour votre appréciation
la poésie est une porte ouverte pour qui veut bien la franchir, une fois la porte franchie tout est possible ...