samedi 2 mai 2020

caviardage 4






Roman 



 On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans. 
- Un beau soir, foin des bocks et de la limonade, 
Des cafés tapageurs aux lustres éclatants ! 
- On va sous les tilleuls verts de la promenade. 

Les tilleuls sentent bon dans les bons soirs de juin ! 
L'air est parfois si doux, qu'on ferme la paupière ; 
Le vent chargé de bruits - la ville n'est pas loin 
- A des parfums de vigne et des parfums de bière... 


 II 

 - Voilà qu'on aperçoit un tout petit chiffon 
D'azur sombre, encadré d'une petite branche, 
Piqué d'une mauvaise étoile, qui se fond 
Avec de doux frissons, petite et toute blanche...

Nuit de juin ! Dix-sept ans ! - On se laisse griser. 
La sève est du champagne et vous monte à la tête... 
On divague ; on se sent aux lèvres un baiser 
Qui palpite là, comme une petite bête... 


III 

Le cœur fou robinsonne à travers les romans, 
- Lorsque, dans la clarté d'un pâle réverbère, 
Passe une demoiselle aux petits airs charmants, 
Sous l'ombre du faux col effrayant de son père... 

 Et, comme elle vous trouve immensément naïf, 
Tout en faisant trotter ses petites bottines, 
Elle se tourne, alerte et d'un mouvement vif... 
- Sur vos lèvres alors meurent les cavatines... 


 IV 

Vous êtes amoureux. Loué jusqu'au mois d'août. 
Vous êtes amoureux. - Vos sonnets La font rire. 
Tous vos amis s'en vont, vous êtes mauvais goût. 
- Puis l'adorée, un soir, a daigné vous écrire !... 

- Ce soir-là..., - vous rentrez aux cafés éclatants, 
Vous demandez des bocks ou de la limonade... 
- On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans 
Et qu'on a des tilleuls verts sur la promenade.


                                                                                  Arthur Rimbaud




***








Un soir 
sous les tilleuls
parfums    frissons   nuit de juin 
la sève monte à la tête 

le cœur pâle sous l’ombre 
trouve ses petites cavatines 

vous êtes amoureux 
                   ce soir 
                           sur la promenade 




***







A dix-sept ans
éclatants
on ferme la paupière
avec de doux frissons

On se laisse griser
comme une petite bête
cœur fou à travers les romans

J...




***








Parfois, si loin
on aperçoit
aux lèvres
le cœur fou
clarté ombre
immensément amoureux

Annick B




***







Roman
n'est pas sérieux
parfums de bière
mauvaise étoile
divague comme une bête
pâle   naïf
dix-sept ans

Anonyme




***








« ḫāwyār »... 

 Amoureux de l'ombre, 
Tête pâle, 
Frissons : 
Un cœur... 

Monte le soir. 
Juin ! 
Sous la sève, la nuit trouve ses parfums... 

Cavatines sur la promenade. 

 Petites, 
Êtes-vous sous les tilleuls ? 

À ce soir ? 

Arthur, ce n'est pas sérieux ! 


Bernard




***








dix-sept ans  -  nuit de juin
le cœur fou au mois d’août
pas sérieux  -  dix-sept ans

 Jean




***







-
Air, vent
parfums-frissons

Sève divague
palpite le cœur

 Passe l'ombre
lèvres meurent

Soir sur la promenade
-

Bourrache




***








Roman 



 On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans. 
- Un beau soir, foin des bocks et de la limonade, 
Des cafés tapageurs aux lustres éclatants ! 
- On va sous les tilleuls verts de la promenade. 

Les tilleuls sentent bon dans les bons soirs de juin ! 
L'air est parfois si doux, qu'on ferme la paupière ; 
Le vent chargé de bruits - la ville n'est pas loin 
- A des parfums de vigne et des parfums de bière... 


II 

- Voilà qu'on aperçoit un tout petit chiffon 
D'azur sombre, encadré d'une petite branche, 
Piqué d'une mauvaise étoile, qui se fond 
Avec de doux frissons, petite et toute blanche... 

 Nuit de juin ! Dix-sept ans ! - On se laisse griser. 
La sève est du champagne et vous monte à la tête... 
On divague ; on se sent aux lèvres un baiser 
Qui palpite là, comme une petite bête... 


III 

Le coeur fou robinsonne à travers les romans, 
- Lorsque, dans la clarté d'un pâle réverbère, 
Passe une demoiselle aux petits airs charmants, 
Sous l'ombre du faux col effrayant de son père... 

Et, comme elle vous trouve immensément naïf, 
Tout en faisant trotter ses petites bottines, 
Elle se tourne, alerte et d'un mouvement vif... 
- Sur vos lèvres alors meurent les cavatines... 


IV 

Vous êtes amoureux. Loué jusqu'au mois d'août. 
Vous êtes amoureux. - Vos sonnets La font rire. 
Tous vos amis s'en vont, vous êtes mauvais goût. 
- Puis l'adorée, un soir, a daigné vous écrire !... 

 - Ce soir-là..., - vous rentrez aux cafés éclatants, 
Vous demandez des bocks ou de la limonade... 
- On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans 
Et qu'on a des tilleuls verts sur la promenade. 



Arthur Rimbaud


***






Le Besoin de Rimbaud pour Bonnefoy (France Culture, 2009)
L’émission « Surpris par la nuit », par Alain Veinstein,
diffusée le 18 mai 2009 sur France Culture. 

***

"Nous avons besoin de notre besoin de Rimbaud."




Génie

   " Il est l'affection et le présent puisqu'il a fait la maison ouverte à l'hiver écumeux et à la rumeur de l'été — lui qui a purifié les boissons et les aliments — lui qui est le charme des lieux fuyant et le délice surhumain des stations. — Il est l'affection et l'avenir, la force et l'amour que nous, debout dans les rages et les ennuis, nous voyons passer dans le ciel de tempête et les drapeaux d'extase.
   Il est l'amour, mesure parfaite et réinventée, raison merveilleuse et imprévue, et l'éternité : machine aimée des qualités fatales. Nous avons tous eu l'épouvante de sa concession et de la nôtre : ô jouissance de notre santé, élan de nos facultés, affection égoïste et passion pour lui, — lui qui nous aime pour sa vie infinie... 
   Et nous nous le rappelons et il voyage... Et si l'Adoration s'en va, sonne, sa Promesse, sonne : "Arrière ces superstitions, ces anciens corps, ces ménages et ces âges. C'est cette époque-ci qui a sombré !" 
   Il ne s'en ira pas, il ne redescendra pas d'un ciel, il n'accomplira pas la rédemption des colères de femmes et des gaîtés des hommes et de tout ce pêché : car c'est fait, lui étant, et étant aimé. 
   Ô ses souffles, ses têtes, ses courses ; la terrible célérité de la perfection des formes et de l'action. 
   Ô fécondité de l'esprit et immensité de l'univers ! 
   Son corps ! Le dégagement rêvé, le brisement de la grâce croisée de violence nouvelle ! 
   Sa vue, sa vue ! tous les agenouillages anciens et les peines relevés à sa suite.
   Son jour ! l'abolition de toutes souffrances sonores et mouvantes dans la musique plus intense. 
   Son pas ! les migrations plus énormes que les anciennes invasions. 
   Ô Lui et nous ! l'orgueil plus bienveillant que les charités perdues. 
   Ô monde ! — et le chant clair des malheurs nouveaux ! 
   Il nous a connus tous et nous a tous aimés, sachons, cette nuit d'hiver, de cap en cap, du pôle tumultueux au château, de la foule à la plage, de regards en regards, forces et sentiments las, le héler et le voir, et le renvoyer, et sous les marées et au haut des déserts de neige, suivre ses vues, — ses souffles — son corps, — son jour.  "

Arthur Rimbaud  / Illuminations





(à vous de jouer si le cœur vous en dit)

7 commentaires:

J... a dit…


A dix-sept ans
éclatants
on ferme la paupière
avec de doux frissons

On se laisse griser
comme une petite bête
cœur fou à travers les romans

♥♥♥

Annick B a dit…

Parfois, si loin
on aperçoit
aux lèvres
le coeur fou
clarté ombre
immensément amoureux

Anonyme a dit…

Roman
n'est pas sérieux
parfums de bière
mauvaise étoile
divague comme une bête
pâle naïf
dix-sept ans

Bernard a dit…

« ḫāwyār »...

Amoureux de l'ombre,
Tête pâle,
Frissons :
Un cœur...

Monte le soir.
Juin !
Sous la sève, la nuit trouve ses parfums...

Cavatines sur la promenade.

Petites,
Êtes-vous sous les tilleuls ?

À ce soir ?

Arthur, ce n'est pas sérieux ! 

Jean a dit…

dix-sept ans - nuit de juin
le cœur fou au mois d’août
pas sérieux - dix-sept ans

Bourrache a dit…

-
Air, vent
parfums-frissons

Sève divague
palpite le coeur

Passe l'ombre
lèvres meurent

Soir sur la promenade
-

mémoire du silence a dit…

TROP BEAU !!!

MERCI à vous tous pour vos belles participations et vos prestations remarquables, profondes et légères ... je suis admirative et très heureuse de partager cette page avec vous, et que Rimbaud nous pardonne ce détournement de son sublime Roman ... oui, c'est pas sérieux ... mais tellement bon... merci encore portez-vous bien, prenez soin de vous la vie est là... je vous aime. ♥♥♥