samedi 25 juillet 2020

ta source







Elle naît tout en bas d'un lieu géométrique 
À la sentir couler, je me crois à la mer 
Parmi les poissons fous, c'est comme une musique 
C'est le printemps et c'est l'automne et c'est l'hiver 

L'été, ses fleurs mouillées au rythme de l'extase 
Dans des bras de folie accrochent les amants 
On dirait que l'amour n'a plus besoin de phrases 
On dirait que les lèvres n'ont plus besoin d'enfants 

Elles coulent les sources, en robe ou en guenilles 
Celles qui sont fermées, celles qu'on n'ouvre plus 
Sous des linges qu'on dit marqués du sceau des filles 
Et ces marques, ça me fait croire qu'il a plu 

Qui que tu sois, toi que je vois, de ma voix triste 
Microsillonne-toi et je n'en saurai rien 
Coule dans ton phono ma voix de l'improviste 
Ma musique te prend les reins alors tu viens 

Ta dune, je la vois, je la sens qui m'ensable 
Avec ce va-et-vient de ta mer qui s'en va 
Qui s'en va et revient mieux que l'imaginable 
Ta source, tu le sais, ne s'imagine pas 

Et tu fais de ma bouche un complice estuaire 
Et tes baisers mouillés dérivant de ton cygne 
Ne se retourneront jamais pour voir la Terre 
 Ta source s'est perdue au fond de ma poitrine 

Ta source... je l'ai bue


Léo Ferré




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