mercredi 13 mai 2020

en résonance (5) "à vous de voir"




aquarelle : JJDorio / à vous de voir




À VOUS DE VOIR 
Ce que je vois me rend muet 
Si j’en parle ce que je vois disparaît 
À vous de voir 
Si le moment venu vous étalez votre langage 
Ou si vous osez jeter vos aquarelles sur la page 
À vous de voir 
Ce que personne que vous ne voit 
Une couleur un rythme un art de vivre 
À vous de voir


21 08 18 



***



À VOUS DE VOIR ce que vous voyez 
une feuille se détache du mirabellier 
les merlettes volent si près du mûrier 
hier à l’école on chantait l’été 
le vent soufflait fort dans nos tabliers 
au cadran solaire des graduations tracées 
indiquent dans l'ombre des heures ensoleillées 
sur son balancier un être endiablé 
regarde perché les heures en allées 
un œil est ouvert ses larmes sont mouillées 
à vous de voir ce qui s’est passé 


Maria-D
21 aout 2018 



***



À VOUS DE VOIR 


J’ai vu ! 

Qu’as-tu vu ? 

J’ai vu sur une palissade des affiches arrachées, une oreille déchirée et un pis de vache gorgé de lait. Des oiseaux volaient au-dessus du boulevard, ils étaient très grands avec des ailes noires. J’ai vu un trou dans l’eau, "même si vous ne le voyez pas d’un bon œil" *, je l’ai vu, j’étais dedans, c’était mon œil. Tout cela m’a sidérée. Alors, je me suis retournée et je suis rentrée à pied. Un coq s’est mis à chanter. 

 Je me suis réveillée. 
J’ai vu à travers les rideaux le soleil qui riait.


* Jacques Prévert 
(le bal du printemps)
J...
13 mai 2020




***


                                                        A VOUS DE VOIR 
                                                        entre les lignes 
                                                        en un coup de balai 
                                                        les mots se sont déliés 
                                                        et volent de leurs propres ailes 
                                                        le butin du matin 
                                                        comme une méditation 
                                                        en rouge et noir 
                                                        au sein d'un monde 
                                                        qui se délite 

                                                        et l'ancre noire de l'écriture 
                                                        s'amarre dans le ravin du jour 


13 mai 2020



***



A VOUS DE VOIR là-haut dans le ciel 
Dieu fait la parade et tournez manège 
A toute vitesse dans les hauteurs célestes 
Les anges caracolent décrochent les cœurs 
A vous de voir s’y vous y croyez 
A vous de voir sur quel pied danser


Anonyme
13 mai 2020



***



On n’y voit rien, écrit l’historien d’art Daniel Arasse, planté devant Les Ménines. Il arase toutes les « lectures » de l’œuvre, communément admises pour se lancer dans des conflits d’interprétation sans fin. Et en effet, si la toile continue des siècles après a être regardée, c’est que le temps ne l’épuise pas, mais l’enrichit. 
On n’y voit bien qu’avec son regard multiplié par les autres, c’est la fonction d’une expo non ? Eh bien ici, le paradoxe c’est que jamais expo n’eut lieu. Tous ces tableautins demeurent au secret. Ce n’est pas par volonté, mais par le hasard qui les a fait « pousser », un hasard proche de la nécessité. Les mots de mes poèmes, qui sont mon quotidien depuis des lustres, ne suffisaient pas à combler la perte de mon être le plus cher au monde. Alors, j’ai peint. Sur tous les supports, sur toutes les surfaces, les couleurs projetées me délivraient, sans que j’y pense, de ma souffrance, c’étaient mes exorcismes. Il y a toujours en nous des choses qui ne passent pas, et qui nous blessent. Une des choses à faire, pour y remédier, l’exorcisme…Leur raison d’être : tenir en échec les puissances environnantes du monde hostile. Henri Michaux (Épreuves exorcismes) 1940-1944 (« Dans le tunnel » créé par la guerre.) 
Merci à Maria Dolores qui permet, même par lointaine reproduction, à ces aquarelles d’exister, et de proliférer dans le regard singulier et les mots pour le dire, de ceux et celles qui « peignent » leur passage sur cet espace offert aux rêveurs et rêveuses de mots. Ainsi, ce « butin du matin, comme une méditation en rouge et noir, au sein d'un monde qui se délite, et l'ancre noire de l'écriture (qui) s'amarre dans le ravin du jour. » 
Je ne saurais mieux dire.

13 mai 2020






vous qui passez par ici
observez l'aquarelle et si le cœur vous le dit 
à vos plumes pour un poème qui s’intitulerait
"À VOUS DE VOIR"

7 commentaires:

J... a dit…

À VOUS DE VOIR

J’ai vu !

Qu’as-tu vu ?

J’ai vu sur une palissade des affiches arrachées, une oreille déchirée et un pis de vache gorgé de lait. Des oiseaux volaient au-dessus du boulevard, ils étaient très grands avec des ailes noires. J’ai vu un trou dans l’eau, "même si vous ne le voyez pas d’un bon œil", je l’ai vu, j’étais dedans, c’était mon œil. Tout cela m’a sidérée. Alors, je me suis retournée et je suis rentrée à pied. Un coq s’est mis à chanter.

Je me suis réveillée.
J’ai vu à travers les rideaux le soleil qui riait.


♥♥♥

J... a dit…

"même si vous ne le voyez pas d’un bon œil"
J'ai oublié de préciser que c'est de Prévert dans le Grand bal du printemps

Laura-Solange a dit…

A VOUS DE VOIR
entre les lignes
en un coup de balai
les mots se sont déliés
et volent de leurs propres ailes
le butin du matin
comme une méditation
en rouge et noir
au sein d'un monde
qui se délite

et l'ancre noire de l'écriture
s'amarre dans le ravin du jour

mémoire du silence a dit…

Merci à vous deux pour votre belle participation matinale ... j'aime beaucoup, oui.

Anonyme a dit…

A VOUS DE VOIR là-haut dans le ciel
Dieu fait la parade et tournez manège
A toute vitesse dans les hauteurs célestes
Les anges caracolent décrochent les cœurs
A vous de voir s’y vous y croyez
A vous de voir sur quel pied danser

mémoire du silence a dit…

Merci cher Anonyme pour cette belle fantaisie. J'aime.

DORIO a dit…


On n’y voit rien, écrit l’historien d’art Daniel Arasse, planté devant Les Ménines. Il arase toutes les « lectures » de l’œuvre, communément admises pour se lancer dans des conflits d’interprétation sans fin. Et en effet, si la toile continue des siècles après a être regardée, c’est que le temps ne l’épuise pas, mais l’enrichit.
On n’y voit bien qu’avec son regard multiplié par les autres, c’est la fonction d’une expo non ? Eh bien ici, le paradoxe c’est que jamais expo n’eut lieu. Tous ces tableautins demeurent au secret. Ce n’est pas par volonté, mais par le hasard qui les a fait « pousser », un hasard proche de la nécessité. Les mots de mes poèmes, qui sont mon quotidien depuis des lustres, ne suffisaient pas à combler la perte de mon être le plus cher au monde. Alors, j’ai peint. Sur tous les supports, sur toutes les surfaces, les couleurs projetées me délivraient, sans que j’y pense, de ma souffrance, c’étaient mes exorcismes. Il y a toujours en nous des choses qui ne passent pas, et qui nous blessent. Une des choses à faire, pour y remédier, l’exorcisme…Leur raison d’être : tenir en échec les puissances environnantes du monde hostile. Henri Michaux (Épreuves exorcismes) 1940-1944 (« Dans le tunnel » créé par la guerre.)
Merci à Maria Dolores qui permet, même par lointaine reproduction, à ces aquarelles d’exister, et de proliférer dans le regard singulier et les mots pour le dire, de ceux et celles qui « peignent » leur passage sur cet espace offert aux rêveurs et rêveuses de mots. Ainsi, ce « butin du matin, comme une méditation en rouge et noir, au sein d'un monde qui se délite, et l'ancre noire de l'écriture (qui) s'amarre dans le ravin du jour. »
Je ne saurais mieux dire