I
Ligne à ligne je te disperse avec un art qui ne me fut
donné que dans les incipits.
Je me tiens là, en ton nom et selon ton désir, pour
remercier tes accompagnateurs à ce dernier voyage, les
convier à écourter l’adieu et à rejoindre un banquet qui
sied à ton souvenir.
Permets-moi de te voir, maintenant que tu es sorti de
moi et moi de toi, sain et sauf telle la prose épurée sur
une pierre qui verdit ou jaunit en ton absence. Et permets-moi
de vous ramasser, ton nom et toi, comme les
passants ramassent les olives oubliées par les cueilleurs
et recouvertes de gravillons. Partons donc ensemble, toi
et moi, dans deux directions :
Toi, vers une deuxième vie promise par la langue chez
un lecteur qui échapperait à la chute d’un astre.
Moi, vers un rendez-vous plus d’une fois remis avec
une mort à laquelle j’avais promis dans un poème une
coupe de vin rouge. Nulle gêne pour le poète s’il ment, lui qui ne ment qu’en amour car les territoires du cœur
sont grands ouverts à l’invasion séductrice.
Mahmoud Darwich / Présente absence / ACTES SUD ...p.9
2 commentaires:
le grand et cher
oui Brigitte, et le plus qu'aimé ;-)
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