mercredi 12 novembre 2014

" la dérive des sacrifiés "

pour Roger Dautais


La dérive des sacrifiés :  pour Mémoire du silence / Roger Dautais




Leurs voix de pierre   de sable et d’eau 

                       les entendez-vous ? 

sur le radeau de pierre 
                 dérive 
entre les récifs 


j’entends leur clameur       le silence de pierre


ils sont treize
debout
un homme      cinq femmes
sept enfants
à la dérive


c’est leur malheur que l’océan réclame
élus de Dieu ils sont en sacrifice


ont-ils faim ?      ont-ils soif ?      ont-ils peur ?
ont-ils du bonheur dans le cœur ? 


eau trouble brassée    salée      eau du ciel en appel
sur ma joue leur âme en étincelle

voix souterraines venues du fond des mers
les cœurs cognent   les cœurs aiment

ils sont là    face au large
                         cloués à leur vie verticale 

visages absents          yeux de pierre 

                         le désespoir en équilibre 

cœurs en naufrage 
sortis d’un livre noir 

quelle souffrance est la leur ? 
                              quel supplice s’exhale ? 

ils dérivent en silence érigés vers le ciel
                              offerts au bienfaiteur 
                              offerts à la lumière 


de cette eau sombre naîtra une eau limpide 

mémoire du silence
regard ouvert sur leur présence au monde



***



" Les yeux regardent... 

Au fond du cœur , l'esprit invente. 

Voyants, passagers de leur Île, 
Ils n'ont de fièvre qu'Océan. 

Depuis long temps, à marcher sur les eaux, ce sont fiers funambules, 
patinés des marées et des senteurs iodées. 

Des enfants, des aînés, 
les épaules fugaces, 
se figent comme pierres, 
pesantes libertés. 

Peur de perdre la tête ? 
Mémoire chancelante ? 
Non. 
Le corps est équilibre, 
assise de rocher, 
force grave emmurée. 
Ils sont riches de sons, de musiques enroulées, de mots entrechoqués. 
Leur histoire est lointaine et se souvient de goûts, de saveurs épicées, de breuvages marins aux lumières filtrées. 
Ils prennent bain de boue, livrent leurs pleurs de sable et couleurs basanées. 

Colonie des embruns, tribu des solitaires, ainsi tous vers le large savent d'où vient le vent, la brise hospitalière. 
Leur âme ailleurs voyage, laisse ici cette trace, 
œuvre éprise d'artiste, 
passeur des grands mystères. 

Les yeux regardent. 

Au fond du cœur, l'esprit s'invente. "

 
Bernard. B





merci à Roger Dautais : LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS   ici  ...  pour son cadeau
et  merci à Bernard pour son écho ;-)

The House is in Silence by Cecile Corbel on Grooveshark  

6 commentaires:

François a dit…

Magnifique, un bel hommage à tous ces sacrifiés, de toutes les ères. Vous avez le don chère Maria de toujours résonner, de saisir ce que l'autre vous dit, vous êtes une magnifique "écoutante".

Maïté/Aliénor a dit…

magnifique duo de mots et de composition.
Vous vibrez tous les deux aux mêmes émotions.Vous donnez à voir et entendre, contre l'oubli et la banalisation.
La mémoire du silence prend encore plus son sens ici.

Gérard a dit…

Tu as les mots justes pour ces sacrifiés de la mer." cœurs en naufrage "

Anonyme a dit…

Empilés
sur un esquif
ils y ont cru
se sont noyés

Bernard a dit…


Les yeux regardent...

Au fond du coeur, l'esprit invente.

Voyants, passagers de leur Île,
Ils n'ont de fièvre qu'Océan.

Depuis long temps, à marcher sur les eaux, ce sont fiers funambules,
patinés des marées et des senteurs iodées.

Des enfants, des aînés,
les épaules fugaces,
se figent comme pierres,
pesantes libertés.

Peur de perdre la tête?
Mémoire chancelante?
Non.
Le corps est équilibre,
assise de rocher,
force grave emmurée.
Ils sont riches de sons, de musiques enroulées, de mots entrechoqués.
Leur histoire est lointaine et se souvient de goûts, de saveurs épicées, de breuvages marins aux lumières filtrées.
Ils prennent bain de boue, livrent leurs pleurs de sable et couleurs basanées.

Colonie des embruns, tribu des solitaires, ainsi tous vers le large savent d'où vient le vent, la brise hospitalière. Leur âme ailleurs voyage, laisse ici cette trace,
oeuvre éprise d'artiste,
passeur des grands mystères.

Les yeux regardent.

Au fond du coeur, l'esprit s'invente.


Merci à Roger DAUTAIS et à Maria-Dolores CANO

J... a dit…

Quelle belle rencontre encore entre vous trois ♥♥♥
c'est émouvant parce que tragique, mais vous en faites quelque chose de majestueux, quel bel hommage vous rendez à ces hommes, ces femmes, ces enfants de l'exil.
à vous trois ♥♥♥