« Cette voix parle en chacun de nous, elle est silencieuse »
D’où viennent
ces mots qui vagissent
dans mon silence
me mettent
aux aguets
exigent
d’être fixés
sur une feuille
qu’ont-ils
à m’apprendre
sur eux
sur moi
Sans ces mots
que j’ai taillés
que serais-je
devenu
comment
aurais-je
pu ne pas
sombrer
comment
aurais-je pu
bâtir la maison
que j’ai dû
édifier pour
me construire
Frémissement
à l’intime
du silence
un murmure
d’abord indistinct
puis des mots cristallisent
se nouent les uns aux autres
avec et sans moi
un poème se dicte
me fait don d’une vie
plus intense que la vie
Une rumeur
à peine audible
mêlée à une poussée
un appel
elle hausse le ton
se précise
des mots étouffés
vite perdus
je me sonde
les cherche
tâtonne
au sein du silence
qui les a repris
ce qui voudrait
éclore
ne cesse de coaguler
se défaire
se recomposer
ne cesse de s’absenter
et de réapparaître
des mots plus vaillants
luttent s’imposent se nouent
donnent consistance
à ce qu’il leur faut
engendrer
la main entre en action
transcrit de poème
qui lui est dicté
que dit-il
La vague te saisit
te soulève
t’emporte au large
le temps a pris fin
la lumière avisée
de l’immense
qui t’accueille
calmement bercé
par la houle
dans la paix
une joie mêlée
de douleur
la lucide ivresse
du ruissellement
exacerbée
par la conscience
du tragique de la vie
puis la vague te dépose
au creux du quotidien
tu n’en es pas dépité
persistent
la paix et la lumière
Ce chêne centenaire
a pris racine
en ma rêverie
sans fin
je me glisse
dans ses racines
me hisse
dans son tronc
ses branches
notre continuelle
croissance
notre lente
élévation
Une pierre
ou plutôt
un galet
un galet
que ma main
caresse
la tiède et lisse
et dense concrétion
de ma plénitude
Une alvéole
exiguë
au plus reculé
du plus enfoui
un silence
d’abîme
hors du temps
mêlé à l’humus
l’être se déploie
vague dans
le sans-limite
La substance interne
n’est plus qu’un œil
un œil acharné
à s’élucider
à pénétrer
le plus enfoui
atteindre
le dedans du dedans
là où s’offrent
la paix et la lumière
l’inaltérable joyau
de la haute connaissance
Charles Juliet / L'Opulence de la nuit ...P.O.L... p 109 à 117
" déjà
s'ébauche
le visage
de l'inconnu
que tu m'aides
à enfanter "
Ch. Juliet / L'œil se scrute
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